Collaboration

9 septembre 2011 par - Spectacle vivant

Louis Dunoyer est président de la commission Musique.

Hier soir, au Théâtre des Variétés, je suis allé voir « Collaboration » , de Ronald Harwood, avec Michel Aumont, Didier Sandre et Christiane Cohendy, dans une mise en scène de George Werler.
Etant musicien et non critique dramatique, je ne trouverai probablement pas les mots pour dire l’émotion que j’ai ressentie. Richard Strauss est un immense compositeur, dont l’image, en tant qu’homme, est assez mauvaise, pour les raisons que l’on sait. La finesse de l’écriture de Ronald Harwood le montre tel qu’il était peut-être, tel que l’admirateur que je suis voudrait qu’il eut été :  un être humain, avec ses faiblesses et ses lâchetés, un homme qui aime sa femme, sa belle-fille juive et ses petits-enfants, au point de se compromettre avec l’infâme régime afin de les protéger. Un homme qui aime et admire sincèrement son collaborateur et ami juif Stefan Zweig. Un homme, enfin, dont la passion pour l’art qu’il pratique avec génie l’aveuglera.

Dans la mise en scène de Georges Werler, lorsque, sommé de s’expliquer dans le cadre des procès de dénazification, le vieil homme, quelques mois avant sa mort, parle avec humilité des quatre derniers lieder qu’il est en train d’écrire, la musique prend le relais de la parole : la voix de soprano, pour laquelle personne, peut-être, n’a jamais aussi bien écrit que lui, se prolonge dans un solo de cor d’une beauté et d’une élévation sublimes… un moment d’éternité qui répond à la question que posa l’épouse de Richard Strauss à Georg Solti, après le concert que celui-ci dirigea lors des funérailles du compositeur : « Pourquoi un homme qui a écrit une telle musique doit-il mourir un jour ? ».

Un grand texte, de grands comédiens, de grands personnages : il fallait toute la sobriété et la justesse de Georges Werler pour que ces éléments prennent toute leur force. Tout juste s’autorise-t-il quelques très belles images, avec la complicité de Jacques Puisais pour la lumière et d’Agostino Pace pour les décors. Et puis, il a su admirablement bien se servir d’un élément de décor immatériel capable, plus que tout autre, de déclencher les émotions les plus profondes : la musique de Richard Strauss…

Louis Dunoyer

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