Le Président de la République à l’écoute du spectacle vivant

24 novembre 2011 par - Spectacle vivant

Jean-Paul Alègre

Jean-Paul Alègre, Vice-Président Théâtre

Le 14 novembre dernier, le Président de la République a souhaité prendre le temps, au cours d’un déjeuner convivial, d’évoquer les problèmes du spectacle vivant.

Quand j’écris prendre le temps, il ne s’agit pas d’une simple formule.
Que l’on en juge : nous invitant à nous asseoir à 13 heures précises, le Président ne nous a quittés que deux heures trente plus tard ! Si je souligne ce point, c’est qu’il me paraît essentiel, car, quelles que soient les opinions ou positions politiques des participants (et il est inutile de préciser combien elles sont diverses !), chacun s’accorda à reconnaître qu’il y avait là un signal fort, encourageant, à la hauteur des ce que nous estimons devoir être la place du spectacle vivant dans notre société.

Se trouvaient réunis autour du président, de son Ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand et de son Conseiller pour la Culture, Olivier Henrard, François le Pillouër, président du Syndéac, Michel Lefeivre, président du Syndicat National des Scènes Publiques, Christian Schiaretti, directeur du TNP, Bernard Murat, directeur du théâtre Edouard VII et président du Syndicat des Théâtres privés, Jean-Louis Martinelli, directeur du Théâtre des Amandiers, Olivier Py, directeur du Théâtre national de l’Odéon, Emmanuel Demarcy-Motta, directeur du Théâtre de la Ville, Olivier Meyer, directeur du Théâtre de l’Ouest Parisien, Jean-Marie Besset, directeur du CDN de Montpellier, Cyril Gely, auteur du succès parisien, Diplomatie, Jean-Pierre Vincent, ancien administrateur du Français.
J’avais donc plus spécifiquement la tâche de porter la parole collective des auteurs.

Ma première intervention fut donc évidente. Il convenait de souligner que le Président soutient fermement le droit d’auteur, dans une époque où ce dernier ne manque pas d’adversaires résolus, dont les plus dangereux sont ceux qui, de bonne foi pourrait-on dire, l’ignorent ou se demandent à quoi il peut bien servir, et ceux qui, plus consciemment, le déclarent obsolète face aux nouvelles technologies.

Nicolas Sarkozy, très au fait de ces questions, nous reprécisa ses convictions dans ce domaine. Nous les partageons, bien évidemment.
Je vis qu’il était moins disposé à m’entendre lorsque je lui fis remarquer que le relèvement de la TVA, de 5,5 à 7 pour cent représentait pour nous, les auteurs, une double peine, puisque nos œuvres, pour vivre, ont besoin du relais de la scène, mais aussi, bien souvent, du livre. Le président, très combatif sur ce sujet, eut beau jeu de me rétorquer que la TVA restait à 2,2 pour cent pour les 140 premières représentations d’un spectacle, et que, en période de crise, nous étions relativement épargnés. Je lui concédai qu’il était un redoutable débatteur et que j’étais un piètre fiscaliste, mais la question fut posée et le débat n’est pas clos !
Sur les autres grands sujets que la SACD souhaitait évoquer, la question de la création d’un observatoire des pratiques du théâtre semble faire consensus, même si le Président souhaite qu’il soit piloté par la profession, ce qui n’est pas tout à fait notre conception.

Il y a, par contre, plus de difficultés à se mettre d’accord sur la création d’un fonds de soutien au spectacle vivant, mais cela est surtout dû à de profondes divergences de vue au sein même de la profession, certains craignant qu’une structure de cette nature amorce un désengagement de l’État à l’égard du théâtre public. Nicolas Sarkozy a par ailleurs défendu avec fougue la création d’un tel dispositif dans le secteur de la musique (Centre national de la musique financé par les fournisseurs d’accès à Internet) et il a insisté sur le fait que cette décision ne préjudicierait en rien à la prise de mesures comparables dans le secteur du théâtre, si les professionnels faisaient preuve de la même force de proposition que la filière musicale.

Enfin, et ce n’est pas la moindre des avancées, le Président de la République n’est pas opposé à l’idée de proposer une loi d’orientation sur le spectacle vivant qui permette de fixer des objectifs clairs en matière de diffusion des spectacles, de financements, mais aussi de répartition et de gouvernance de ces aides.
Il n’y en a jamais eu sous la Vème République.

Bien d’autres propositions furent avancées, le débat fut vif, passionnant, non dépourvu d’humour.
Nous avons été écoutés, entendus, y compris dans nos critiques qui furent parfois acérées.
Notre conviction profonde qui est que le spectacle vivant est un atout pour toute démocratie, et une chance particulière pour notre pays dans une période de crise, aura été partagée par la plus haute autorité de l’Etat.

Ce dialogue doit être absolument poursuivi.
Je remercie ceux qui l’on rendu possible, particulièrement Olivier Henrard, conseiller du Président.

Jean-Paul Alègre
Président de la commission théâtre du Conseil d’Administration de la SACD

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