Rêves sonores

15 juin 2007 par - Divers

Nous ne sommes pas à un paradoxe près, l’époque veut ça. Prenons la circulation des œuvres et leur mise à disposition, la confection possible pour chacun d’une vidéo-biblio-audiothèque dans un petit appareil qui tient dans la poche (déjà dans plus de 100 millions de poches) et qui peut ainsi nous accompagner partout.
Pour les amateurs de son, cela rappelle furieusement l’irruption du transistor. Vous vous souvenez des immenses postes de radio trônant au milieu du salon et impossible à bouger et puis tout à coup ces petits appareils qu’on pouvait emporter à la plage, en voiture, dans un champ ? L’explosion du rock n’ roll a été rendue possible grâce au transistor, ce n’est qu’un exemple.

Je reviens au paradoxe. Tant de sources de programmes, d’appareils tenant dans les poches — ou en bandeau sur la tête, le poignet ou dans les chaussettes — d’opérateurs divers et variés, et pourtant, un pan immense d’œuvres restant invisibles, ou plutôt inaudibles. Je parle naturellement des œuvres radio, les fictions, dramatiques, appelons-les comme nous voulons.
Comme je suis las de répéter la même chose, et que ce matin, par temps un peu gris, je suis pris de lyrisme, je vous annonce que 2008 sera l’année mondiale de la création sonore. L’invitation est lancée, à tous les partenaires, Ministère de la Culture, artistes, auteurs, opérateurs, producteurs, il s’agit de nous retrouver pour permettre enfin l’accès des œuvres audio à un très large public.
Commençons par le patrimoine, vous imaginez des banques de programmes où l’on pourrait enfin télécharger soixante ans de dramatiques, les plus grands textes littéraires, des créations jamais éditées, pour la plupart entendues une seule fois et se promenant éventuellement quelque part dans la galaxie en poussières sonores ?
Ce n’est pas que du lyrisme, c’est un vrai combat, impossible à mener seul, mais qui en vaut vraiment la peine. Inutile de dire que ces œuvres devraient aussi pouvoir être rediffusées sur les radios qui le souhaitent, et quel formidable appel d’air pour les créateurs sonores indépendants qui le plus souvent bricolent dans leur coin sans trop de moyens.
L’appel est lancé, année 2008, à vous tous de prendre le relais. Nous avons ouvert ce chantier à la Sacd, d’autres nous suivent, mais il faut aller plus vite, il en va de la survie de la création sonore, de la fiction radio. Ne riez pas, il y a un peu plus d’un an la plupart des gens ne savaient pas ce qu’était un podcast. Aujourd’hui c’est l’outil qui permet à une radio comme France Culture de connaître une croissance extraordinaire sur Internet et ensuite sur les ondes. Mais leurs programmes de fictions, fleuron de la chaîne, ne sont pas encore disponibles en téléchargement. À de rares exceptions, cette question de la mise à disposition des œuvres audio touche tous les pays, à nous d’essayer de faire basculer la radio vers l’avenir.
En attendant, pour le plaisir, et pour mieux comprendre ce dont je parle, allez fureter sur le site de l’INA, à fictions radio. Entendre les voix d’Edith Piaf et Fernand Ledoux dans Pluie de Somerset Maugham ; Arletty, Dalio et Louis Seigner dans le « film sonore » La dame de Shanghai d’après Welles et Sherwood King ; écouter les « effets spéciaux de musique concrète » de Pierre Henry dans La fille de Londres de Pierre Mac Orlan…
Une mise en appétit, et une petite idée de ce trésor à mettre à jour. Ça et les créations d’aujourd’hui disponibles facilement, sur les ondes et en téléchargement, vous imaginez ?
Allez, 2008, année de la création sonore.

Yves Nilly
Administrateur SACD délégué à la radio

www.ina.fr/archivespourtous/

pour rappel : le guide SACD de la fiction radio et création sonore

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